Dans « Ecoute voir » paru chez Artderien, Patricia Favreau invite d’emblée à l’écoute. Il faut dire qu’après que son cœur ait cédé au venin, aux colères du « dieu viril », « au père / au frère / aux petits fiancés », « liée à (eux) par les orifices / dès le berceau des serpents »… « à présent ce qu’elle dira / personne ne la croira ».
C’est pourtant le « giron originel » qui fuite là, qui fuite en acouphène. Ce que l’on refuse d’ordinaire d’entendre est couché là, avec la gravité d’un aigu, avec le lancinant d’un sillon qui grave en sous épaisseur une mémoire ornière qui (s’) effrite sous nos pas. Des textes d’urgence, écrits pour être dits, car ce qui est écrit là devait être dit. A haute voix pour que l’organe du langage sorte, dans un souffle, de ses bas fonds bafoués.
Patricia voudrait embrasser l’homme qu’elle perd dans chaque homme. Patricia cherche l’autre parmi tant d’autres, comme une liste à rayer, comme un miroir sous sa buée.
Sans aucune autre méthode pour mourir que celle de « se foutre (sévèrement) la race ». Brûler les ravages sans toutefois franchir le pas de la fenêtre d’où l’on « balance / tranquille »… et oublier ce que l’on fait là pour s’épargner le brutal des sous venirs.
Puis, d’un ravage l’autre (alors que « Tutto costa /.../ Amore costa / Sesso costa / Tutto costa /… E / Io / Non funziona più »), bras tendu dans l’anonymat en allée, sous goutte à goutte « Le long des couloirs gris / Chacune / Guette / La chute des bouts de soi », chacune guette « L’espoir vénéneux (qui) tisse une tunique abrasive »… après que le corps, la langue soit passés par tous les états, le leitmotiv « Plutôt crever que de crever » revient comme une prière venant apporter « la paix sur toutes les âmes »
Et c’est la langue qui, dans sa « Lumineuse / Brûlante / Glorieuse / Nudité » prend corps dans « Une force si grande qui ne peut être qu’une faiblesse ».
Frappante fragilité grave les esprits… et ce qui compte, ce n’est pas tant de savoir s’il fallait, ou non, croire Patricia Favreau quand elle parle d’elle ou d’elles… ce qui compte c’est que, poète, elle nous ait emmenés voir loin loin au bout de sa nuit.
Un de ces incroyables voyages sans retour « avec le monde enlacé ».e.s.
Kommentare